En qualité de grand frère, Aladji Mamdi s’est adressé à la nouvelle génération de rappeurs guinéens. Dans l’émission ‘’C’était mieux avant’’ sur Djoma TV, ce membre du groupe SMI (Silatigui) a prodigué des conseils à ces MC’s qui ne suivent pas les traces de leurs aînés.
Le samedi dernier, Mamdi était l’invité de ‘’C’était mieux avant’’, une émission présentée par l’animateur culturel Sené Diallo. Au cours de leur échange, il a d’abord fait un rappel sur les moments forts du mouvement hip hop guinéen où une séance studio pour l’enregistrement d’un seul titre était payée à ‘’20 et quelques milles de franc guinéen.’’
« Quand on passait chez Bangoura, on faisait le ‘’One Way’’. Le ‘’One Way’’, ce n’était pas sur les différentes pistes comme aujourd’hui…»
Parlant de la nouvelle génération, dira-t-il : « Aujourd’hui, la science est développée. Tu peux avoir un beat sur internet. Quand ils viennent au studio, ils travaillent en droppage. Dropper, c’est aller mot par mot jusqu’à former une phrase. C’est comme ça ils font leurs enregistrements. Tout cela c’est de la facilité. Ils vont commencer à poser tout de suite, ils se trompent, ils disent, je reviens après. Le surlendemain ou une semaine après, ils reviennent, ils commencent à recoller encore.»
« A notre époque, ce n’était pas ça. A notre temps, c’était du ‘’One Way’’. Il y avait un grand frère de Fori Dina, feu Alhassane. Ce monsieur nous suivait à la lettre. Quelque soit la langue que tu venais poser, à part ce qu’il ne comprend pas…dès que tu fais une faute, il était allergique à cela. On te rectifie directement. C’est des personnes qui ont beaucoup fait pour la musique. Quand tu fais une faute, ils sont irrités. Ils bloquent tout. Si tu veux, on te jette même ton argent sur ton visage. Quand vous aviez faim, il vous donne à manger…», a-t-il rappelé.
Poursuivant son intervention, il a laissé entendre que : « les jeunes ont la facilité, mais ils n’ont pas l’identité. Ils sont perdus. Ils veulent faire du Booba, du Soprano, la Fouine. Ils n’ont pas d’identité. Alors que le meilleur rap, c’est dans nos langues. Je dirais que le hip hop a juste fait le tour. Daraa J l’a dit dans ‘’Boumerang’’. Le hip hop a quitté l’Afrique pour l’Europe. Il s’est retrouvé en Amérique. Si on le fait ici, ce n’est pas qu’on a singé. C’est quelque chose qui est à nous. C’est les esclaves qui ont transporté le hip hop aux Etats Unis. Donc le hip hop est carrément africain. La beauté de ce hip hop, c’est quand tu pose dans ta langue. C’est pourquoi à un moment donné dans les années 99, on ne rappait qu’en langue malinké, tantôt en soussou… La nouvelle génération n’est pas en train de suivre exactement nos traces. Il y a une perdition. Ils sont carrément passés à côté…», souligne Aladji Mamdi.
Au cours de son intervention, il a profité pour paraphraser Fori Dina qui affirmait dans l’un des numéros de ‘’C’était mieux avant’’ : « Tu vas beau rapper en anglais, mais tu ne seras Fifty Cent. Tu ne seras pas aussi La Fouine, quand tu rappes en français.»
Pour finir, il a demandé aux jeunes artistes de la musique urbaine de rester authentiques en se basant sur nos instruments traditionnels : « Mais aussi les textes, s’il faut les métisser. Tous les gars de la deuxième génération, on a appris à métisser. On peut faire un texte en français, poular, soussou, dans un seul couplet. A l’époque c’était comme ça. Aujourd’hui, on voit cela rarement.»
Aboubacar Fodé Bangoura