Nondi K : « La musique guinéenne n’a pas d’avenir » (Interview)

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Abdel Kader Sylla a.k.a Nondi K était l’un des membres fondateurs du groupe de rap guinéen, Fac Alliance. Un crew de trois MC’s de la old school qui regorgeait que des intellos. Avant la dislocation de ce groupe, Nondi K, Pap-G et Masta X ont sorti quatre (4) albums sur le marché du disque dont trois en trio et un en duo, notamment : ‘’Louganyi’’, ‘’Embargo’’, ‘’Kakilambé’’ et ’’Gorko Soussai’’.

Pour avoir plus de détails sur la séparation de ces trois anciens compagnons du micro, tabouleinfos.com a tendu son micro à Nondi K. Quant au come-back de Fac Alliance, l’actuel animateur de l’émission ‘’Max Hip Hop’’ se dit prêt, mais avec des conditions  pour ne pas que le groupe soit victime d’une autre dislocation.

Ci-dessous, retrouvez cet entretien.

Tabouleinfos : On ne peut pas parler de Nondi-K sans parler du groupe Fac Alliance dont vous aviez été l’un des membres. Est-ce qu’on peut connaitre les raisons de la dislocation ce groupe ?

Nondi K : La raison est simple. En Guinée, vous créez un groupe, vous êtes tous animé d’aller de l’avant et sur le chemin, il y a un manque de vision commune. C’est-à-dire l’objectif que vous voulez atteindre ne soit pas le même chez les autres. Nous avons été victime de cet état de fait. A un moment donné, vu les charges sociales de certains membres, il y a eu incompréhension. Parce que la Guinée étant ce qu’elle est, on dit qu’on ne vit pas de son art. On avait eu la chance d’aller vendre nos albums au-delà de nos frontières, remplir les stades et les palais de cultures d’autres pays. Une chose rare pour les artistes guinéens. On vivait de ce qu’on gagnait hors du pays. Mais au retour en Guinée, il y a eu un manque de prestation. Cela a joué sur le groupe financièrement. C’est mon analyse personnelle. Je pense que cela a été un impacte négatif sur la bonne marche du groupe…

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Tabouleinfos : S’il y avait quelque chose à refaire dans l’histoire du groupe, laquelle préférez-vous revoir ?

Nondi K : C’est de penser à un manager professionnel, qui ne devait même pas être en Guinée. Lors de nos tournées au Burkina-Faso et au Mali où nous avons rencontré notre producteur international, qui nous a distribué sur le plan africain, nous avons été contactés par des managers internationaux qui ont vu notre talent et notre avenir musical et ils nous ont fait comprendre qu’on pouvait aller très loin. Ce jour-là, si je pouvais signer avec ces gens, je pense que Fac Alliance n’allait pas être disloqué. Parce qu’ils avaient  promis de faire un contrat entre nous et les membres du groupe pour ne pas qu’il ait dislocation. Donc si j’avais quelque chose à refaire pour maintenir Fac Alliance. Si je pouvais retourner en arrière, j’allais dire à ces messieurs de signer un contrat de management sur le plan international. Et nous n’allons pas être victime de ce qu’on est en train de vivre aujourd’hui.

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Tabouleinfos : Etes-vous prêt à suivre les autres membres s’ils vous le demandent pour la renaissance du groupe Fac Alliance ?

Nondi K : Le temps change l’homme. Si réellement cela se posait comme question, je vais d’abord poser des principes et des conditions pour que le groupe retrouve son identité d’antan et puisse atteindre les objectifs. J’ai des conditions à poser si cela doit se faire. Les conditions qui vont faire en sorte que le groupe ne puisse plus vivre ce qu’on a vécu… Je suis prêt pour cela.

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Tabouleinfos : Selon vous, qu’est-ce qui est à la base de la dislocation des groupes de rap de la old school guinéen ?

Nondi K : Je peux dire que la dislocation de chaque groupe a une cause. Je pense que je connais la nôtre. Comme je l’ai dit, ce manque de vision commune pour l’atteinte de l’objectif commun. Pour d’autres personnes, je n’ai aucune idée la dessus. Mais ce que je sais, ce à quoi je pense c’est des malentendus, des mesquineries, des jalousies qui n’ont rien à faire dans la bonne marche du groupe… Manque de manager professionnel, de structures qui peuvent gérer les carrières présentes et futures, sont à la base de la dislocation des groupes en Guinée.

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Tabouleinfos : Aujourd’hui, qu’est-ce qui manque à la musique guinéenne qu’il faut apporter pour que nos artistes soient présents dans les grands rendez-vous musicaux internationaux ?

Nondi K : Pour moi, ce qui manque à la musique guinéenne, c’est les gestionnaires de cette musique. Ceux qui la gèrent doivent être formés comme ceux du Nigéria, la Côte d’Ivoire, le Mali. Même les maliens nous dépassent aujourd’hui, parce que ceux qui sont autour des artistes sont bien formés. Ils ont des objectifs qui poussent leurs artistes à aller se vendre au-delà de leur pays. C’est en Guinée où tu trouves des gestionnaires de musique qui sont des amis aux artistes, des membres de famille. Donc la musique guinéenne n’a pas d’avenir. Ceux qui sont malins, ils se font leurs propres managers. Ils ont une vision large (côté organisationnel). Quant au côté créativité, je félicite Soul Bang’s, parce que lui, quand je l’ai vu au départ, j’ai dit que le jour qu’il va intégrer les instruments de musique africaine ou un rythme traditionnel de chez nous, avec une vision large internationale, il va remporter ‘’le Prix Découverte RFI’’. C’est ce que j’avais prédit, c’est comme s’il avait lu dans mes pensées. Fac Alliance, on a été nominé au ‘’Kundé d’Or’’ au Burkina-Faso et au ‘’Tamani d’Or’’ au Mali. C’est parce que nous avons mis en valeur notre identité culturelle dans laquelle nous avions mis une dose de rap et qui a donné une nouvelle couleur musicale. Les gens veulent écouter de nouvelle sonorité. La Guinée est un pays qui a un réservoir de rythmes que les autres ne connaissent pas encore. Si tu prends un rythme guinéen, tu le façonnes très bien pour donner une nouvelle couleur musicale, tu as la chance d’être écouté ailleurs. Ce que les artistes trouvent bizarre ici, c’est ce qui marche chez les autres. Selon moi, pour que la musique guinéenne puisse vraiment être exportée, il faut d’abord que les gestionnaires des artistes aient des rêves de vendre leurs artistes au-delà de nos frontières et que ces artistes pensent à valoriser nos rythmes…

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Aboubacar Fodé Bangoura

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