La chanteuse a été libérée le 22 janvier, après sept mois de prison pour « non-représentation d’enfant » dans le cadre d’un litige judiciaire avec son ex-conjoint. Elle prépare la sortie d’un livre et d’une pièce de théâtre.

Le début d’une nouvelle vie artistique pour Rokia Traoré ? La chanteuse et guitariste de 51 ans, condamnée en octobre 2023 par le tribunal correctionnel de Bruxelles à une peine de deux ans d’emprisonnement pour « non-représentation d’enfant », est libre. Elle raconte au Parisien  ses conditions de détentions en Belgique et comment l’écriture lui a permis de s’intégrer.

En 2023, sa condamnation au pénal découlait du fait qu’elle avait refusé de se soumettre à la décision d’un juge civil belge accordant la garde de l’enfant au père, Jan Goossens. Elle ne s’était pas présentée au tribunal correctionnel et avait été condamnée par défaut. Rokia Traoré affirme de son côté ne jamais avoir reçu de convocation de la justice belge. En juin 2024, la chanteuse, toujours sous la menace d’un mandat d’arrêt européen, a été arrêtée à l’aéroport de Rome, où elle venait d’atterrir pour donner un concert. Elle avait été transférée et incarcérée à Bruxelles, fin novembre, avant d’être libérée le 23 janvier.

« Je ne comprenais pas pourquoi j’étais là, pourquoi on me demandait de me mettre nue pour me fouiller, pourquoi on me parlait mal », raconte-t-elle au Parisien. La chanteuse avait déjà été arrêtée en 2020 à Roissy, avant d’être incarcérée pendant une durée de deux semaines à la prison de Fleury-Mérogis, en Essonne. « Quand j’ai été arrêtée à Roissy, je me rendais à un concert au théâtre Bolchoï à Moscou. Je portais beaucoup de bijoux, et j’avais avec moi trois valises de vêtements. Du coup, j’ai eu droit à des remarques désobligeantes, des moqueries sur le fait que l’administration pénitentiaire m’avait réservé une suite dans un quatre-étoiles. Pourquoi cette méchanceté gratuite ? Pourquoi me terroriser ? », dénonce-t-elle.

Un rôle de messagère

L’artiste a vécu des premiers jours de détention difficiles : « il y a beaucoup de violence et de méchanceté comme on peut le voir au cinéma », déclare-t-elle. Puis la « solidarité » et « l’humanité » sont apparues. « Des femmes avec de lourdes peines se sont senties tout de suite proches de moi, et m’ont prise sous leur protection. Elles me disaient : “Tu n’es pas comme nous, tu n’as rien à faire ici”. »  Si l’artiste se sentait « comme un rat en cage », sa notoriété lui a été favorable. « Elle me voyait beaucoup écrire, cela me permettait de tenir. Leur message était clair : “ On compte sur toi pour parler de la prison, toi, on va t’écouter. ” Certains m’ont vraiment protégée. »

La plus grande peur de Rokia Traoré a toujours été de ne pas connaître sa date de libération. « J’ignorais comment tout ça allait finir. » Pendant ses sept mois et demi d’incarcération, la femme n’a pas vu une fois ses enfants. L’un est étudiant à Paris, l’autre vit au Mali. « C’était tellement douloureux de penser à leur désarroi (…) J’ai pu vendre des investissements et m’organiser pour qu’ils gardent le même niveau de vie (…). Je voulais qu’ils comprennent que je gardais ma place de maman », explique-t-elle.

Une pièce de théâtre et un livre

Son amour pour la musique, Rokia Traoré l’a entretenu avec un lecteur et quelques CD : « Fela Kuti, Miriam Makeba, Ella Fitzgerald et Haendel. » Son temps était surtout consacré à l’écriture. « Je ne faisais que ça. J’écrivais ce qu’il se passait. Au début, j’étais dans une position d’observatrice et, après, les autres filles sont venues me parler d’elles, de leurs histoires. »

La femme de 51 ans est actuellement en préparation d’une pièce de théâtre, inspirée par sa détention. La troupe est déjà trouvée. Il s’agit des Inachevés de Moïse Touré, basée à Grenoble. « On va la créer en 2025 au Mali. Puis, on jouera aussi ici en 2026 », assure-t-elle. Rokia Traoré vient également de terminer l’écriture d’un livre, écrit à la première personne.

Selon l’avocat de son ex-mari, cité par l’AFP en janvier, la chanteuse a l’obligation de rester « en Europe ». Une nouvelle audience est prévue en juin à Bruxelles.

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