Bob Marley au Lyceum Theatre, à Londres

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A l’occasion de deux soirées dans le somptueux théâtre londonien, Bob Marley éléctrisait la scène et son public, propulsant sa musique à des stades jusqu’alors non atteints. Flashback

6 février 1945 : naissance de Bob Marley.

Au Royaume-Uni, à la mi-1975, une grande majorité des jeunes professait une foi musicale, celle de rock progressif. Genesis, Yes et leurs longues suites instrumentales, manière de pacte de fer entre le rock et classique, et des thèmes et des textes puisés dans les racines des mythes celtiques. Le rock en était là, après la grâce des années 1960 avant son effondrement dans la première partie de la décennie. Puis sa renaissance. Le rock s’était transformé en un vaisseau spatial baroque et électrique mais peu nombreux étaient alors ceux qui voulaient monter à bord. Mais ces instrumentaux, ces vols oniriques ont été oubliés en seulement deux concerts, par un autre rêve collectif et un autre voyage, assorti de rites magiques. Son jeune prêtre, venait de Trench Town, en Jamaïque, une ancienne possession du Royaume Uni. Les 17 et 18 Juillet 1975, le chant de Bob Marley venait de tracer une nouvelle route.

Sa musique rédemptrice est née ce jour de juillet, à Londres.

Cet après-midi en Juillet, une seule chose est certaine : personne n’a jamais vu ces « étranges » personnes dans le centre de Londres, devant le Théâtre Lyceum, l’un des plus beaux lieux de la capitale anglaise. Trois mille Jamaïcains mêlés à de jeunes Anglais viennent écouter ce qu’ils considèrent comme leur père spirituel. Presque personne n’a de billet, mais tout le monde veut y assister. La police essaie d’intervenir, mais rien à faire : deux portes sont arrachées de leurs gonds et la foule libre, peut enfin entrer. Reste aujourd’hui le brillant témoignage de ce concert mémorable, un album live, enregistré par le studio d’enregistrement mobile des Rolling Stones.

Spiritual father

Bob Marley est alors à son apogée. Il vient juste de publier Natty Dread, l’album qui le consacre star internationale. L’atmosphère cette soirée est indescriptible. Dennis Morris, un photographe de concert, raconte : « Ce soir-là, toutes les personnes présentes ont décidé de devenir rastafari. » « Lively Up Yourself » et « No Woman No Cry » amènent le public et la musique populaire vers un nouveau territoire – exotique et non contaminée. Le rock vient de découvrir ce que signifie le mot sainteté; et s’est transformé en entrée du paradis dans le cœur de l’Occident qui trouvera ses disciples en Angleterre. Sans ce concert, le Clash, Police et des dizaines d’autres groupes n’auraient tout simplement jamais existé.

Mais il ne s’agit pas seulement de faire découvrir le reggae aux jeunes occidentaux. Dans ces deux concerts, Bob Marley semble presque quitter sa propre histoire et ses origines. Il a réussi – et c’est ce qui le rend magique – à recouvrir ses chansons d’une couche de peinture fraîche, les transformant en journal d’un rebelle racontant un voyage à une vocation œcuménique. Voici l’exploit réalisé par Marley ces deux soirs à Londres. En ajoutant une très forte dose d’électricité très rock au son son de son groupe d’une part, et, d’autre part, en mettant en scène un « appel et réponse » avec les I-Threes, ses trois choristes.

Nouveau lendemain

Ici, il ne s’agit plus d’addition, mais d’une pure alchimie. Marley est capable d’extraire de tous les genres musicaux qu’il a traversé, tous les éléments qui sonnent « messianique ». Il les absorbe et il les injecte dans un tout nouveau tissu musical. Le rock prendra l’avenir de l’humanité l’un de ses sujets de prédilection, et mieux, comme le meilleur moyen d’atteindre la terre promise, sans naïveté, dogme ou canons. Sa musique rédemptrice est née ce jour de juillet, à Londres.

Source : rollingstone.fr

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